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vendredi 16 septembre 2016

Témoignage d'une maman d'enfants nés prématurés

Nous sommes les parents de 2 enfants nés très grands prématurés, moins de 6 mois de grossesse, ce qui présente donc une incertitude du développement.

Nous avons adopté notre fils à l’âge de 4 mois ½ d’âge réel, soit 1 mois d’âge corrigé (ce qui correspond à sa date de naissance prévue.) Il pesait à peine 2kg900 pour 42 cm.
Il se trouvait encore en néonatologie avec tout un tas de tuyaux pour s’alimenter et respirer, et nous avons fait connaissance dans le milieu médical pendant 15 jours avant de pouvoir le ramener à la maison.
Etant né en France, nous avons eu un dossier médical très complet, mais malgré cela l’incertitude persistait, risque de retard au niveau de la motricité globale, fine, du langage, et plus tard de déficits de l’attention, de la concentration qui peuvent poser soucis dans le milieu scolaire.

La 1ère année avec notre fils fut à la fois superbe et angoissante. Nous étions plus dans le soin que dans l’accompagnement à la vraie vie d’un nourrisson. Il avait beaucoup de mal à grossir et à grandir, il ne devait pas être trop souvent en contact avec d’autres enfants pour ne pas attraper le moindre rhume, qui dégénérait rapidement en bronchiolites où il fallait l’hospitaliser sous oxygène.

Concernant la rééducation, nous avions quelques rdv en psychomotricité pour nous apprendre les gestes pour l’aider à se retourner, à se tenir assis, à faire du 4 pattes puis à marcher. Un enfant né à termes sait faire tout cela naturellement, mais certains enfants prématurés ont plus de mal, ils évoluent vraiment chacun à leur propre rythme, ce qu’il faut respecter. Il ne faut pas vouloir que son enfant rentre dans les cases du carnet de santé, oublier un certain temps la norme, et faire attention à la pression que les médecins peuvent nous mettre parfois.

En approchant de sa 2ème année, sur le plan moteur et poids / taille tout s’est accéléré, pour notre plus grand bonheur. Quand il a su tenir assis, il a de suite su prendre l’équilibre pour marcher, nous sommes très fiers du moindre progrès de nos enfants.

Par contre nous commencions à nous poser d’autres questions, face à son retard de langage, à ses comportements, à ses difficultés à accepter la frustration, à exprimer ses émotions. Avec notre fils ça n’est pas dans la demi-mesure et ça n’est pas simple tous les jours !

Nous avions fait un bilan auprès du CAMSP, qui a duré 6 mois avec 2 rdv par semaines. À l’issu de ce bilan on nous a ensuite orientés vers un CMP pour qu’il puisse bénéficier d’un suivi pluridisciplinaire régulier. Sauf qu’ils n’ont pas pu prendre en charge notre fils par manque de place.
Pour le bien de notre enfant, nous avons organisé ses soins en libéral, et à partir de là, mon agenda s’est rempli aussi vite que celui du Président de la République : je n’arrivais plus à gérer mon temps entre mon travail, les soins et mon rôle de maman, parce qu’une maman n’est pas une infirmière pour son enfant.

Nous sommes partis à la chasse aux orthophonistes disponibles et, aux psychomotriciens. Nous nous disions que c’était dû à l’incertitude du développement, qu’il avait un retard à rattraper, et que tout rentrerait rapidement dans l’ordre.

Nous avons donc, pendant un an, fait 900km par mois entre les deux rdv orthophonistes et les deux rdv psychomotricité hebdomadaires, sans oublier la kiné une fois par semaine.

Nous avons servi d’intermédiaire entre les professionnels, et nous avons découvert en nous un 3ème métier, celui d’être presque médecin. Parce qu’il faut se documenter, pour arriver à suivre et pouvoir retransmettre au mieux ! Ce qu’il faut savoir également c’est que dans les centres pluridisciplinaires, les soins sont pris en charge directement par la sécurité sociale, mais en libéral les psychomotriciens ont des tarifs assez élevés, et ça n’est pas remboursés.

Entre ma réduction de travail pour pouvoir accompagner mon fils à ses soins, les frais d’essence et d’usure de la voiture et les soins, nous avons déboursé près de 8000€ dans l’année. Ceci nous a fait prendre conscience qu’il fallait faire une demande de compensation auprès de la Maison Départementale des Personnes Handicapées. Et voici un nouveau combat : monter un dossier compliqué, passer le cap de faire une demande écrite qui va juger du degré du handicap de son enfant, devoir se battre car, faute de diagnostic, nous avons eu un 1er refus avant d’obtenir finalement gain de cause. A ce stade là je ne remercierai jamais assez une vraie amie qui a su m’aider et m’épauler.

Nous entrons dans la 3ème année de notre fils, nous ne voyons pas forcément de progrès concernant son comportement et son retard de langage, pour la motricité globale tout va pour le mieux. Nous avons continué à rechercher LE spécialiste qui pourrait nous aiguiller face aux difficultés de notre fils, et enfin un médecin évoque un diagnostic autre que son incertitude du développement : un trouble envahissant du développement une pathologie du spectre autistique, une différence que tout enfant, né prématuré ou à terme, peut avoir.

Le but du diagnostic n’était pas de faire rentrer notre enfant dans une case, et de lui coller une étiquette, mais de trouver les soins et les professionnels les plus adapté à ses difficultés. Et nous avons enfin trouvé, après 18 mois de galère, son rythme entre les soins, sa rentrée à l’école et son quotidien familiale. Nous avons dû apprendre avec lui la communication par pictogrammes, lui enseigner la notion du temps grâce à une horloge spéciale. Tout ceci nous ne pouvions pas l’inventer, nous avons dû être guidés par la pédopsychiatre qui a posé le diagnostic et tout cela à changer notre qualité de vie.

A côté de toutes ses contraintes, quand nous voyons qu’en à peine 3 mois notre fils a fait de réel progrès, que s’est un petit garçon très souriant qui aime croquer la vie à pleine dents, un vrai champion de vélo (sans petites roues !) et de natation, car du haut de ses 3 ans il se débrouille parfaitement bien dans ses disciplines, nous sommes des parents comblés de bonheur. C’est un petit garçon très sensible, qui a besoin de repères et d’être un maximum rassuré.

Sur le plan scolaire cela ne se passe pas trop mal, après avoir réunis les professionnels de santé et les institutrices lors d’une réunion pédagogique, dont la mise en œuvre a encore demandé de l’énergie. Cela en valait la peine car notre fils va avoir le droit à une auxiliaire de vie scolaire, pour l’aider dans les apprentissages, l’aider à se concentrer et se re centrer sur ses activités.


Sa petite sœur est, elle aussi, arrivée trop tôt dans notre monde. Quand on nous a proposés notre fille, qui est née au Vietnam, et qui au moment de l’attribution été âgée d’un an, nous avons dû revoir en couple nos limites réelles face à l’incertitude de développement. En effet, un enfant né prématuré dans un pays défavorisé, sans aucune stimulation faute de moyens à l’orphelinat, c’est tout autre chose que d’avoir eu dans nos bras notre petit garçon de 4 mois qui a débuté sa vie entouré de notre amour.

Notre fille, à 12 mois, avait un bon maintien de la tête, pas de problème d’hyper ou d’hypotonie des membres, mais ne tenait pas assisse.
A ce stade-là de la décision, d’accepter d’être ses parents pour toujours, nous nous demandions quels étaient nos limites face à l’incertitude de son avenir. Etions-nous prêts à accepter qu’elle puisse ne jamais marcher ? Quelle serait sa scolarité ?

Chez un enfant prématuré, il ne faut pas penser qu’au retard de développement, mais également à d’éventuels déficits sensoriels, touchant l’audition, ou la vue. Notre fille a eu des examens et tout allait apparemment pour le mieux.

Six mois plus tard notre famille est au complet, avec le bonheur d’avoir un garçon de 3 ans et une petite fille de 20 mois. Notre fille a un retard global de développement mais nous sommes agréablement surpris de ses capacités en motricité fine, en matière de réflexion, d’attention.
Par contre elle ne marche toujours pas. Quand nous adoptons des petits loulous avec ce genre de pathologie, nous sommes aussi confrontés aux regards des autres, avec des réflexions du style « Ha, mais ce n’est pas normal qu’a 2 ans elle ne marche pas, quel est son soucis ? » ou « Elle sera handicapée toute sa vie ? ». Il faut être à l’aise avec son choix, pour ne pas en être blessés et pour accompagner nos enfants dans l’acceptation de leur différence.

Sa prise en charge ressemble un peu à celle des débuts de son frère : kiné 2 fois par semaines, psychomotricité 1 fois et 2 fois de l’orthophoniste car elle ne parle pas… Est-ce dû à un retard ou à la barrière de la langue ? Le temps nous le dira.

Par contre, après vérification, concernant sa vue il y aurait un assez gros souci sur le plan visuel. A ce jour, nous n’en savons pas plus, nous attendons un nouvel examen, mais les ophtalmologues nous ont demandé si nous étions préparés à ce qu’elle puisse perdre la vue.

De toute façon, comme tout parents, nous devons faire face aux aléas de la vie et soigner / accompagner notre fille dans les meilleures conditions. Nous commençons à cheminer sur cette éventuelle perte visuelle, nous parlons d’apprendre avec elle le braille, nous regardons quelle scolarité peut suivre un enfant malvoyant, nous dédramatisons en parlant avec notre famille avec un peu d’humour, en disant que nous prendrons un chien Labrador bien plus doué dans l’accompagnement que notre propre labrador, qui préfère son gros coussin pour dormir. Et peut être que cet examen décisif nous annoncera que notre fille ne perdra pas la vue ! Là, nous irons fêter cela au restaurant, hé oui, toutes les excuses sont bonnes pour se faire inviter au restaurant par son mari !
Tout ceci pour dire que nous nous préparons à accueillir des enfants avec telle ou telle particularité, mais que finalement l’enfant peut très bien ne plus avoir de soucis une fois les rééducations en cours, ou il peut avoir un tout autre problème de santé. Mais peu importe ce que cela peut être, nous sommes dans le devoir de porter nos enfants vers le haut, dans les meilleurs conditions possibles, comme tout parents qu’il soit biologiques ou adoptifs.
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